Bodhicitta relatif
Beaucoup vivent dans les difficultés et l'insécurité. Cultiver bodhicitta aide à transformer ces problèmes en moyens de progresser sur la voie vers la libération. En effet, la transformation d'une chose en une autre provoque des effets entièrement différents. Ainsi, par exemple, en fonction de l'état d'esprit dans lequel elles sont vécues, les circonstances adverses peuvent devenir des moyens d'acquérir l'illumination. C'est pourquoi bodhicitta doit être fermement implanté en nous. Il ne s'agit ici ni de spéculation philosophique ni d'un discours ne s'adressant qu'à l'intellect, mais d'un travail sur soi d'une absolue nécessité.
Quand surgit quelque problème, notre réaction habituelle consiste à en blâmer nos semblables ou les circonstances, une attitude que l'on retrouve aussi bien chez les individus, les nations et même les animaux. Pourtant cette réaction est fallacieuse. La véritable cause de tout problème réside dans l'amour de soi, le chérissement de soi-même.
Pour satisfaire le "soi" nous avons maintes fois mal agi. Nous avons poursuivi les plaisirs, apprécié certaines choses et rejeté d'autres. Nous nous sommes battus pour nos possession, nos prérogatives, ajoutant ainsi à la détresse et à la misère morale, tout ceci pour protéger et sauvegarder notre "soi" bien-aimé. Ce genre de conduite peut être décelé dans tous les plans d'existence.
D'innombrables empreintes de ces actions malheureuses sont emmagasinées en nous, leur cause première étant toujours le chérissement de soi-même. Nous sommes si fortement sous son emprise que nous ne pouvons supporter les privations de nourriture, de boisson ou autre.
Il existe deux moyens de se débarrasser des erreurs accumulés : en détruire les graines par les mesures appropriées ou accepter leurs effets, quels qu'ils soient. Le second est plus simple. selon cette optique, les maux que nous inflige autrui sont une grande aide, car ils nous fornissent la possibilité de nous délivrer de nos mauvaises actions. Il faut reconnaître l'amour de soi et l'égoïsme comme les véritables ennemis et les choses ou les personnes par lesquelles nous souffrons comme les meilleurs soutiens. Un esprit entraîné de cette manière est inattaquable. En d'autres termes, la souffrance physique cesse d'affecter l'état d'esprit. Nous savons tous que, si une personne ordinaire tombe malade, elle devient bien souvent la proie du découragement, ce qui rejaillit défavorablement sur sa souffrance corporelle. Dans la même situation, le bodhisattva, qui saura conserver intacte sa joie, surpassera sa souffrance. Dans ce monde où nous sommes sans cesse confrontés aux difficultés, un esprit bien formé présente un grand avantage. Une riche nourriture spirituelle procure la force nécessaire pour franchir les obstacles.
Pour aspirer à cet idéal, deux tâches nous incombent :
- considérer l'amour de soi comme le pire ennemi ;
- considérer tous les êtres comme les meilleurs amis et les servir.
Malheureusement, nous sommes encore incapables de mener à bien ces objectifs. Par conséquent, nous y préparer doit être de première importance. Dans la succession indéfinie des existences, tous les êtres ont été nos pères et nos mères. Les payer de retour pour la bonté dont ils ont fait preuve à notre égard dans cette relation de parents à enfants, satisfaire leurs besoins et les aider, tel est notre but. Ils sont en quête du bonheur et en leur offrant notre amour nous nous ouvrons à la technique appelée "Tonglen" (tib. : prendre et donner). Pour cet exercice, comme à l'occasion de toute autre pratique, commençons par demander refuge (Bouddha, Dharma et Sangha - la communauté). De même que l'on nettoie une assiette avant d'y déposer une nourriture succulente, de même nous devons avoir développé la volonté de prendre sur nous les souffrances des êtres. C'est donc le premier aspect à cultiver : imaginons leur détresse sous la forme de rayons noirs venant des dix directions de l'espace et nous pénétrant. Ensuite, cultivons la résolution de leur donner à tous bonheur, vertu et mérite avec une prière fervente à l'objet de refuge pour que ce voeu s'accomplisse. Imaginons que des rayons lumineux issus de notre personne touchent les êtres, exauçant leurs désirs. Répétons cet exercice de nombreuses fois.
Une application continue nous rapprochera peu à peu du plein éveil (parachevé pour le bien de tous les êtres), la seule position permettant d'apporter un soutien efficace et direct. Cette pratique sera difficile à réaliser au commencement, car l'habitude et la pensée de prendre soin d'autrui nous font défaut. Pour ceci, la meilleure approche consistera à considérer les difficultés qui touchent présentement notre personne ou ne manqueront pas de survenir dans cette vie ou les suivantes. La compréhension née de l'exploration de la souffrance personnelle sera alors étendue à tous les êtres. Prenant ainsi conscience de leur détresse, nous leur donnerons alors l'aide nécessaire : ceci doit être notre but.
Peu à peu ce mouvement d'acceptation et d'offrande se fera spontanément jusqu'à devenir une bénédiction pour l'adepte lui-même. D'ordinaire, l'attachement est notre réponse aux objets plaisants, les objets déplaisants suscitant notre aversion, tandis que ce qui apparaît comme neutre n'engendre qu'indifférence. Empêchons l'attachement et donnons à tous amour et sagesse ; prenons sur nous-mêmes ce qui est pénible et laissons autrui partager les bienfaits de nos bonnes qualités. Grâce à ce travail nos souffrances seront considérablement allégées, nous nous trouverons dans la position de transformer les circonstances défavorables en des moyens utiles à la progression vers l'éveil, comme l'oiseau qui adapte sa course aux vents pour s'élever dans le ciel. Prenons sur nous les afflictions du monde, donnons-lui en retour bonheur et vertu.
Il serait malhonnête de se satisfaire de la seule méditation ; en toutes occasions on devra l'appliquer avec notre entourage. Souvenons-nous encore que nous prenons soin de notre corps dans le seul but de servir les autres. C'est aussi l'unique raison de notre écoute des enseignements. A chaque instant, soyons prêts à "prendre et donner" en mangeant, dormant, marchant, dans toute activité. La respiration étant un mouvement naturel ininterrompu, associons "aspirer et expirer"à "prendre et donner".
Placer ses forces dans la pratique du Dharma donne tout son sens à la vie. Nous pouvons nous y employer dès maintenant. Que ceci soit notre effort dominant.
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